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Transférabilité des régimes de retraite à prestations définies

Portabilité des régimes de retraite à prestations définies

La transposition de la directive européenne sur la portabilité des régimes à prestations définies est enfin effective (du moins devrait l’être très prochainement) !

ADDING reprend ci-après l’analyse du projet d’ordonnance soumis aux professionnels du sujet et les conséquences pour les entreprises disposant d’un régime de retraite à prestations définies.

Droits aléatoires ou droits acquis

Tout nouveau régime à prestations définies attribuera des droits qui seront définitivement acquis par les bénéficiaires (même si des conditions d’ancienneté peuvent exister). Ces droits resteront payables sous forme de rente, à compter de la liquidation du régime de l’assurance vieillesse mais ils resteront désormais dus, même si le bénéficiaire quitte l’entreprise avant son départ à la retraite.

S’agissant des régimes existant, aucun nouveau droit ne pourra être attribué (hormis pour les régimes mis en place et fermés aux nouveaux entrants avant le 20 mai 2014, date de mise en œuvre effective de la directive européenne).

A ce stade, il n’est pas précisé si les entreprises seront obligées de transformer leurs régimes existants en régime à droit acquis. L’article 5 laisse penser que cette obligation n’existe pas et qu’il s’agit d’une possibilité dont le choix est laissé à l’entreprise.

Les droits acquis, sécurisés chez un assureur / mutuelle / institution de prévoyance seront transférables vers des contrats de même nature. A ce stade, il n’est pas fait mention du devenir des sommes en cas de décès avant le départ à la retraite.

Plafonnement des droits et abandon des droits rétroactifs

Le niveau des droits acquis chaque année est désormais limité à 3 % par an, les droits étant calculés sur le salaire de l’année d’acquisition. Ils ne sont plus fonction du salaire de fin de carrière, et les droits acquis sont revalorisés, tant pour les bénéficiaires présents dans l’entreprise que pour ceux l’ayant quitté, à un coefficient au plus égal à la revalorisation annuelle du Plafond de la Sécurité sociale. Ces droits seront soumis au respect de conditions de performances, y compris pour les salariés non mandataires sociaux. Ces conditions pourront porter sur l’année écoulée ou sur les années précédentes.

Cette limite est en ligne avec les recommandations successives de l’AFEP-MEDEF et de la loi Macron de 2016, afin d’éviter certaines dérives constatées dans le passé.

Le montant total des droits acquis par un salarié, tous employeurs confondus, est plafonné à 30 %, sans précision de l’assiette. Ce point nécessitera assurément un complément de rédaction. En effet, dans le cas où un bénéficiaire se verrait attribuer un salaire moins important sur ses quelques années avant le départ à la retraite (ce qui est relativement fréquent lorsque le Directeur Général cède son poste pour devenir Président), le bénéficiaire risque de se retrouver avec une rente sensiblement plus faible que prévue si le plafonnement à 30 % n’était calculé que sur le dernier salaire.

Une particularité importante : les droits ne peuvent pas être rétroactifs. Ce point est structurant dans la mesure où bon nombre de régimes à prestations définies étaient des régimes de cadres dirigeants. Ces dirigeants, lorsqu’ils entraient dans la catégorie de personnel concernée par le régime, se voyaient recalculé des droits sur leur carrière passée dans l’entreprise. Il ne sera donc plus possible de constituer un complément de retraite significatif sur une durée relativement courte.

Externalisation, contributions et taxes

Pour assurer la transférabilité du régime, les sommes destinées au financement devront être externalisées. L’organisme d’assurance recevra de l’entreprise, chaque année, la liste des salariés et mandataires sociaux bénéficiaires du régime, ainsi que les droits attribués à chacun des bénéficiaires.

Les sommes externalisées seront soumises à une contribution de 29,7 % (montant correspondant vraisemblablement au forfait social de 20 %, augmenté de la CSG/CRDS de 9,7 %, supporté par l’entreprise car ces régimes restent financés à 100 % par l’employeur).

Le traitement social des rentes versées n’est pas fondamentalement modifié puisque les cotisations payées par les retraités sont les suivantes :

  • pour les rentes liquidées avant le 01/01/2011, les cotisations sont de 7 % sur la partie de la rente comprise entre 17 % et 34 % du Plafond Mensuel de la Sécurité sociale (PMSS, soit 3 377 € en 2019) et de 14 % sur la rente supérieure à 34 % du PMSS
  • pour les rentes liquidées après le 01/01/2011, les cotisations sont de 7 % sur la partie de la rente comprise entre 14 % et 20 % du PMSS et de 14 % sur la rente supérieure à 20 % PMSS

D’un point de vue comptable, la transformation des droits aléatoires en droits acquis va entraîner mécaniquement une augmentation de l’engagement au sens de la norme IAS 19 car le taux de turnover disparaît. A ce stade en tout cas, il n’est pas prévu l’introduction d’une valeur de type ABO (Accumulated Benefit Obligation) présente dans les normes comptables américaines (FAS158). Il faudra attendre d’avoir un positionnement du Conseil National de la Comptabilité pour avoir une position en norme française.

Finalement, hormis quelques éléments de rédaction qui restent à préciser, le projet d’ordonnance est en ligne avec les évolutions récentes de l’AFEP-MEDEF et de la loi Macron. L’accueil de ces nouveaux dispositifs est cependant difficile à évaluer à ce jour. L’impossibilité de reconstituer des droits passés remet en cause l’un des avantages des anciens « Article 39 » qui permettaient de constituer des droits à retraite significatifs sur une période relativement courte. Cependant, une entreprise disposant d’un régime de ce type aura un élément de package de rémunération qui peut être significatif pour des cadres dirigeants.

 

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